No’Au, durabilité et numérique au service d’une architecture sensible et innovante – Entretien avec la fondatrice de cette belle agence, Noémie Aureau

Dans la série de nos interviews passionnantes, nous avons cette semaine la chance de découvrir le travail d’une jeune architecte-ingénieur Noémie Aureau, qui a fondé son agence No’Au en 2023 et qui a mis BIM, paramétrique et numérique au service de son talent et ses beaux projets. Découvrons son parcours très riche et international et son univers poétique et utopique.

Bonjour Noémie et ravi de t’accueillir sur ABCD Blog. Pourrais-tu stp te présenter en quelques mots à nos lectrices et lecteurs ?

Tu es architecte-ingénieur, même si cela tend à se répandre de plus en plus, quelle en est la raison ?

J’ai toujours été très curieuse et aimé comprendre ce qui m’entoure, la nature, les phénomènes physiques, la technique, les Sciences en général. Je trouve fascinant de pouvoir appréhender les phénomènes invisibles de l’infiniment petit, tout comme ceux de l’infiniment grand grâce aux théories scientifiques. Également passionnée par les arts, j’ai depuis toute petite souhaité devenir architecte, au sens d’architecte bâtisseur / ingénieur. Cela représentait à mes yeux la quintessence d’un métier à la fois scientifique, humaniste et artistique de par l’extrême richesse offerte par la variété de sa pratique.

Te considères-tu d’ailleurs plus architecte ou ingénieur ?

Aujourd’hui, j’ai fait le choix d’exercer professionnellement en tant qu’architecte en fondant une agence d’architecture car cela me permet d’être la plus libre. En effet, contrairement à d’autres pays, dans le cadre réglementaire français seuls les architectes sont habilités à déposer un permis de construire. Néanmoins, toute ma pratique d’architecte est imprégnée de ma formation d’ingénieure, tant dans l’approche à la structure et la recherche d’économie de la matière, que dans le choix des matériaux par exemple pour améliorer le confort hygrothermique ou acoustique des espaces, ou encore la sélection de stratégies bioclimatiques pour créer des bâtiments résilients et économes en consommation de carbone. 

As-tu depuis toujours été passionnée par l’architecture ? Qu’est-ce qui t’a incité à faire le choix de ce métier ?

Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours souhaité devenir architecte comme je l’expliquais plus haut, même si j’avais rêvé plus jeune de devenir danseuse classique pour suivre les pas de ma grand-mère maternelle et parce que j’ai toujours adoré danser. Malheureusement, je n’avais pas le physique pour ! Je crois que c’est en visitant Venise à dix-sept ans que mon choix s’est définitivement arrêté sur l’architecture comme une évidence.  J’ai d’ailleurs consacré à Venise mon projet de diplôme d’architecte.

Où as-tu fait tes études et quel type d’études as-tu faites ?

Diplômée de l’Ecole Polytechnique après une classe préparatoire en physique chimie, j’ai ensuite suivi un double-diplôme de génie civil et d’architecture entre l’Ecole des Ponts et l’Ecole d’Architecture de Marne-La-Vallée. J’ai ensuite obtenu mon diplôme d’architecte et ma HMONP à l’Ecole d’Architecture de Paris-la-Villette.

Polytechnique, c’est assez original et particulier je crois. Pourrais-tu nous dire sa spécificité et comment se sont déroulées tes études ?

Polytechnique est en effet une institution singulière car il s’agit d’une école d’ingénieurs généraliste et aussi d’une école militaire, et je dirais que ces deux aspects ont eu une grande influence sur ce que je suis. Contrairement à d’autres écoles avec une spécialisation plus définie, le caractère généraliste permet après un tronc commun à tous les étudiants de se créer un parcours sur mesure, ce qui est une chance immense. J’ai pour ma part pu aller explorer tous les domaines qui me passionnaient : biodiversité, physique de l’environnement, énergies nouvelles, chimie, biologie, physique quantique, économie… C’était simplement magique d’avoir l’opportunité de me consacrer à tous ces sujets, guidée par des personnes extrêmement inspirantes comme des membres du GIEC. La grande richesse qui en découle également, c’est que tous mes amis d’école font des métiers complètement différents : écologues, mathématiciens, startups à impact, éleveurs de mouches… ça me permet de continuer à découvrir pleins d’univers !
Pour le côté militaire, cela m’a permis de développer des compétences de gestion de situations humaines parfois complexes que j’utilise tous les jours, notamment en me permettant d’évoluer dans des milieux très différents. Après deux mois d’entraînement en caserne dans les montagnes, j’ai choisi d’effectuer un service civil à la brigade des mineurs des Hauts-de-Seine. A seulement 20 ans, cet univers très particulier et les situations quotidiennes dramatiques dont on est témoin lorsqu’il s’agit de mineurs victimes m’ont profondément marquée. 

Qu’est-ce qui t’a influencé pendant tes études ? On sent une pointe d’utopie à la Boullée dans certains de tes projets qui sont magnifiques.

J’ai découvert les travaux des utopistes lors de mon double diplôme entre l’école des Ponts et l’école d’Architecture de Marne-la-Vallée. Une professeure nous avait présenté les travaux de grands rêveurs comme Boullée ou plus tard Buckminster Füller et leur approche très idéaliste, inspirée de formes mathématiques pures et/ou issues de l’observation de la nature comme le recours aux géométries fractales ou du tissu osseux utilisé pour la conception de la Tour Eiffel, ont suscité en moi en écho tout particulier. Je suis moi aussi très – trop parfois – idéaliste ! L’observation du monde qui nous entoure est ma première source d’inspiration et la nature, du fait de millénaires de sélection naturelle, rescelle de merveilles constructives qu’il ne s’agit que de traduire à l’échelle d’un bâtiment. Enfin, je dois avouer que le nom choisi pour ma nouvelle agence -Atelier No’Au- n’est pas un hasard.  S’il est un clin d’œil à mon nom et à mon approche technique -en jouant sur l’anglais « Know-How », il est aussi l’acronyme des Nouveaux Architectes Utopistes.

Tu t’es aussi occupée d’une grande compétition au niveau international pour un grand industriel français. Pourrais-tu stp nous en parler ?

J’ai fini mes études d’architecture en travaillant en parallèle pour la direction de la recherche et l’innovation du groupe Saint-Gobain. J’avais plus jeune effectué chez eux un stage sur l’optimisation des performances d’un bâtiment industriel restructuré et ils m’ont ensuite proposé de revenir pour suivre le partenariat de sponsoring du Solar Decathlon en lien avec 13 équipes universitaires internationales. L’idée était d’aider les équipes à choisir des matériaux pour construire des habitats passifs mais également d’organiser des workshops avec les chercheurs des centres R&D de Saint-Gobain pour que ceux-ci alimentent la conception des étudiants comme des bureaux d’études sur les sujets de la thermique, de l’acoustique, du confort lumineux… etc. Une période effervescente et internationale assez unique !

L’un de tes autres stages a concerné une exposition universelle et tu as effectué un travail sur des types d’édifices un peu particulier pour une grande Ingénierie. Pourrais-tu stp nous en dire quelques mots ?

J’ai passé mon stage de fin d’études chez Setec au sein d’une équipe hybride d’ingénieurs et d’architectes. Au cours de ces mois, nous devions concevoir cinq pavillons en forme de galets géants sous forme de coque métallique pour accueillir temporairement des commerces de luxe dans les jardins des Boulingrins à Monaco. Ensemble, nous avons développé un script de génération des structures des pavillons nous permettant de produire de façon automatisée les modèles filaires nécessaires à l’analyse structurelle et les dessins d’exécution des coques métalliques. Comme les pavillons devaient ensuite être démontés et remontés ailleurs, il s’agissait de proposer une méthode de construction entièrement préfabriquée en hors site et simplement boulonnée sur chantier pour pouvoir ensuite être facilement transportable.

© Setec

Quand et comment as-tu découvert les technologies numériques et le BIM ? Durant tes études ? Après ?

C’est précisément au cours de ce projet chez Setec que j’ai « plongé dans la marmite » des technologies numériques de conception paramétrique et du BIM, ce qui a complètement révolutionné mon approche de conception par la suite. Cela permet précisément d’implémenter mes idées utopistes de façon concrète dans des projets complexes. Par exemple en intégrant les contraintes de constructibilité à l’aide d’éléments répétitifs, de coût en réfléchissant dès les phases amont aux méthodes d’assemblage, en pouvant optimiser la qualité lumineuse des espaces grâce aux simulations d’éclairement naturel, en implémentant des stratégies de ventilation passive grâce au recours aux simulations thermiques dynamiques … etc. Il s’agit d’outils qui, combinés à l’usage de l’IA que nous découvrons petit à petit, permettent de libérer les possibles mais de façon réaliste et pragmatique. L’idéal d’une utopie constructible en somme.

Dans le cadre de tes études, tu as aussi beaucoup voyagé, notamment aux USA et en Angleterre. Qu’y as-tu fait et les expériences que tu y as acquises t’ont-elles à jamais influencées ?

J’ai réalisé mon premier stage en agence d’architecture à Berlin au cours duquel j’ai travaillé du haut d’une grue sur un chantier d’une école de Prenzlauerberg classée dont je devais faire le relevé précis des dommages de façade. Ce relevé nous a servi à constituer la demande de permis de construire auprès de la commission des monuments historiques et les préconisations de reprises et de consolidation (il s’agissait d’une façade en pierre sévèrement endommagée pendant les bombardements de la seconde guerre mondiale). L’année suivante, j’ai passé quatre mois dans une agence New-Yorkaise à Soho, spécialisée dans la rénovation de maisons à New-York. Ces deux expériences ont forgé d’emblée mon goût pour le patrimoine historique et la réhabilitation.
Enfin, une fois mon diplôme d’architecte en poche, j’ai rejoint le bureau d’études Atelier One à Londres spécialisé dans la conception de structures atypiques auprès d’architectes, d’artistes comme le sculpteur Anish Kapoor ou encore des fabricants d’installations scéniques, une expérience très rock&roll extrêmement inspirante et effervescente où il fallait constamment innover.

Tu nous as notamment parlé de la spécificité Britannique et de la limite ténue entre architecte et ingénieur là-bas. Qu’en est-il réellement et quel en est l’impact sur leurs professions ?

Effectivement, inspirée par des concepteurs très inventifs comme Peter Rice, j’avais choisi le Royaume-Uni précisément car la collaboration entre ingénieurs et architectes y est beaucoup plus fluide, ce qui est une condition qui à mon sens permet d’encourager la possibilité d’innover de façon constructive. Si leurs champs d’expertise réciproque restent distincts comme c’est le cas en France, architectes et ingénieurs ont au Royaume-Uni un dialogue beaucoup plus apaisé, avec un respect mutuel des compétences de chacun, ce que j’apprécie énormément. Ce respect induit aussi une attention aux détails constructifs beaucoup plus forte qu’en France dès les phases amont de conception.

Tu as travaillé à l’époque sur des projets en hors-site et sur une passerelle. Etait-ce précurseur selon toi et utilisez-tu toujours ces approches ?

J’ai effectivement réalisé plusieurs études chez Atelier One en tant qu’ingénieure structure/façade pour des projets où nous proposions des approches complétement modulaires et réalisées en hors-site, que ce soit pour du logement social à l’aide de panneaux CLT pré-usinés en atelier, des bâtiments industriels en charpente bois comme le siège de Vitsoe à Leamington Spa ou bien des façades de logements entièrement préfabriquées en usine.

C’était il y a plus de dix ans et nous commençons maintenant seulement à en parler de plus en plus en France, ce qui me fait prendre conscience à quel point cette approche pour de la construction ordinaire – par opposition aux façades de tours de grande hauteur où la préfabrication est déjà usuelle – était précurseuse !

© Atelier One

Tu as aussi travaillé avec des sculpteurs ? Mais dans quel contexte et pour quels objectifs ?

Mon premier projet chez Atelier One a consisté à dimensionner en phase d’exécution une œuvre dans l’espace public londonien pour l’artiste Tracey Emin. J’ai par la suite dû concevoir plusieurs structures avec des géométries complexes comme un abri d’urgence déployable à géométrie d’origami pour être réalisé avec des éléments plans, un anneau métallique monumental qui devait s’enflammer pour la cérémonie d’ouverture d’une cérémonie sportive ou une sculpture en forme d’algue géante à Boston dont il fallait vérifier qu’elle n’entrerait pas en résonance avec les efforts de vent ! Des challenges toujours a priori assez farfelus mais absolument passionnants. Je ne savais jamais quel défi allait m’attendre quand mon chef m’appelait dans son bureau pour un nouveau projet !  

Tu as ensuite intégré une grande agence d’architecture internationalement reconnue. Pourrais-tu stp nous raconter cela ?

En rentrant en France, j’ai eu la grande chance de rejoindre l’agence de Renzo Piano (RPBW) pour rejoindre l’équipe d’architectes en charge de la réalisation du Palais de Justice de Paris dirigée par Bernard Plattner.

© RPBW

Une opportunité incroyable dans un univers très cosmopolite d’architectes tous très talentueux et passionnés. Ces presque 8 années au sein de l’agence dont j’étais devenue architecte associée ont été une école formidable de l’art de concevoir un projet en lien avec ses composantes techniques, son imaginaire poétique et son utilité sociétale dans la synergie urbaine.

Quels projets y as-tu conçu et construit ? Etaient-ils tous développés avec Revit ?

Après le Palais de Justice de Paris, j’ai été chargée pendant un an de la conception des 60 salles d’audience du palais de Justice de Toronto au Canada, qui a été livré en 2023.

© RPBW
© RPBW / Scott Norsworthy

J’ai ensuite eu le privilège de travailler sur la conception d’un opéra en Asie, mon rêve d’enfant, et de travailler avec Arup au dessin de sa coque de 100 m de portée avec une approche high-tech/low-tech de la recherche de forme héritée des travaux de Gaudi et Frei Otto.

J’ai également travaillé pendant plusieurs années sur deux tours de grande hauteur à Londres et Tokyo, dont je gérais le lot façade. La tour londonienne, Paddington Square, vient d’être livrée à l’automne.

L’un des derniers projets auquel j’ai contribué est une réhabilitation/extension d’une villa belle époque de la Riviera pour accueillir la collection d’art contemporain du Nouveau Musée National de Monaco. Que ce soit en réhabilitation ou en construction neuve, au stade du plan masse, de l’esquisse ou des dessins d’exécution, tous les projets auxquels j’ai participé à l’agence sont intégralement développés avec Revit. Seule la conception géométrique de l’enveloppe de l’opéra a nécessité l’usage de Rhino+Grasshopper pour plus de flexibilité paramétrique.

Qu’est-ce qui t’a poussée à créer ton agence ? Et quelle en est la philosophie/devise globale ?

Après ces longues et riches années de collaboration chez Renzo Piano, j’ai eu l’envie de fonder ma propre agence pour plus de liberté et pour signer mes propres projets d’architecture, projet bien mûri qui s’avère aujourd’hui un nouveau chapitre passionnant.  J’ai aussi ressenti le besoin de m’engager encore davantage de façon à ce que ma pratique d’architecte ingénieure contribue activement à limiter et mitiger l’impact du dérèglement climatique. La devise de l’agence serait la suivante, empruntée à Albert Einstein (dont nous ne prétendons bien entendu pas pour autant avoir le génie ! ) : « Celui qui n’a jamais commis d’erreur n’a jamais tenté d’innover. »

© RPBW

Combien êtes-vous et comment êtes-vous organisés ?

Pour le moment, je suis accompagnée par 2 architectes que je connais très bien et avec lesquels j’ai beaucoup travaillé par le passé. En fonction des résultats des compétitions auxquelles j’ai répondu en groupement avec mes partenaires bureaux d’études et d’autres architectes « amis », mais également plusieurs entreprises partenaires comme VINCI sur des projets en conception-réalisation, notre équipe devra rapidement s’étoffer avec de nouveaux profils !

Faites-vous tous vos projets en BIM avec Revit ?

Dans la lignée de mon expérience chez Setec, Atelier One mais avant tout chez Renzo Piano, nous utilisons à l’agence exclusivement une approche BIM qu’elle que soit la nature des projets. Bien qu’il s’agisse d’un projet de réhabilitation de patrimoine ancien en secteur sauvegardé pour du logement, notre premier projet à l’Atelier No’Au qui vient d’obtenir son permis de construire a été entièrement conçu avec Revit.

Noémie Aureau, Architecte et Ingénieure

Pourquoi ce choix de Revit en tant qu’outil central ?

C’est notre force pour répondre très rapidement aux délais des maîtrises d’ouvrage tout en offrant des propositions architecturales de qualité avec une maîtrise des coûts et de la constructibilité. Cette approche collaborative nous permet une meilleure intégration des enjeux techniques et une prise de décision éclairée tout au long du processus de conception, avec une visualisation 3D constante offerte à la maîtrise d’ouvrage pour valider nos partis pris architecturaux.

Quels sont tes projets dont tu sois la plus fière, dans ton agence et même avant ?

Je suis très fière de notre premier projet de rénovation de patrimoine ancien en Aubrac, il s’agit d’une restructuration lourde de deux corps de bâtiments en pierre avec des charpentes en bois magnifiques.

Nous avons travaillé étroitement avec des entreprises locales très expérimentées dans la pierre et les charpentes anciennes en privilégiant au maximum la conservation de l’existant couplée à de la technologie la plus discrète possible pour permettre de nouveaux usages, notamment l’intégration d’une vaste piscine intérieure pour les hôtes dans une grange rénovée. Cela a posé quelques défis très intéressants structurellement pour ne pas fragiliser l’existant avec les poussées de l’eau et la gestion de la ventilation et de l’hygrométrie fine de la façon la plus discrète possible pour une architecture minimaliste. Nous avons privilégié le réemploi de tous les matériaux déposés, nous réutilisons par exemple les solives et les planchers pour la menuiserie intérieure et restaurons toutes les lauzes des toitures. Nous avons étudié un système de chauffage via pompes à chaleur alimentées par la géothermie. Nous avons aussi travaillé un éclairage scénique pour créer une atmosphère assez magique des espaces intérieurs et extérieurs la nuit.

Quels sont les projets que tu as menés ?

Au-delà des projets déjà cités, j’ai mené à Paris des projets à titre personnel assez rocambolesques mais très intéressants. Nous avions avec mon mari acquis notre premier appartement dans l’un des plus anciens immeubles du vieux Paris rue Saint-Denis, qui était alors sous arrêté de péril. Avec l’équipe du conseil syndical, nous avons travaillé plusieurs années avec l’aide de l’Anah et de la Ville de Paris pour conduire une rénovation lourde de tout le bâtiment avec une réfection de tous les réseaux, des façades et de la structure à pans de bois, le tout en milieu occupé avec le maintien de tous les habitants. Un vrai casse-tête. J’ai eu de longues semaines la façade de ma chambre éventrée tout en étant enceinte, mais c’était très intéressant de résoudre au quotidien des problèmes de chantier de rénovation très concrets qui demandent de trouver des solutions immédiates en bonne intelligence avec tous les corps de métiers (charpentiers, maçons, plombiers, couvreurs… etc).

Tu as aussi développé un très beau projet original et intéressant tournant à la Réunion. Pourrais-tu stp nous en parler ?

Il y quelques temps j’ai été missionnée par VINCI pour un projet complètement atypique : un restaurant panoramique tournant de 400 couverts dans un parc naturel, combiné à un écomusée dédié à l’observation de la faune et la flore. M’inspirant d’un nid d’un oiseau exotique, j’ai proposé un dôme avec un noyau béton sur lequel s’appuient 16 arches en bois lamellé-collé pour créer une enveloppe fixe et facettée entièrement préfabriquée en hors site. La périphérie des plateaux est soutenue par une structure métallique en porte à faux en rotation lente sur un rail circulaire selon le principe d’un roulement à bille. Un dispositif de ventilation naturelle passive a été intégré à la conception pour éviter le recours à la climatisation selon les principes des tours à vent persanes.

Tu travailles aussi sur un projet de bureaux à Monaco ?

Oui, il s’agit d’un projet dont j’étais en charge chez Renzo Piano et que je continue à accompagner via ma nouvelle agence. Il s’agit d’un « bâtiment-paysage » paré en pierre de taille avec un langage architectural assez organique dans lequel s’insèrent 60 grands arbres intégrés à la façade. L’hybridation du végétal dans l’univers minéral des villes est un enjeu qui m’intéresse tout particulièrement pour limiter l’effet d’îlot de chaleur urbain. J’espère que cette démarche pourra être développée dans de nouvelles réalisations pour contribuer à améliorer biodiversité, thermique et tout simplement créer des lieux habités plus désirables pour nos villes.

© RPBW

Quel est ton plus grand regret de projet non exécuté ? Hanoï, l’hôtel tournant ? Un autre ?

 Oui, très certainement la mise en pause indéterminée du projet de Hanoi suite à la pandémie du COVID est une très grande déception. Idem pour le projet du restaurant panoramique que les confinements successifs ont mis à mal. Mais j’espère néanmoins faire renaître ce dernier en l’adaptant éventuellement pour de nouveaux programmes comme un éco hôtel bioclimatique dans un site naturel remarquable. Affaire à suivre… !

Tu utilises des fonctionnalités très poussées de Revit telles que les composants adaptatifs. Pourrais-tu nous en parler ?

Pour le dôme panoramique, la génération fine de la géométrie à l’aide de composants adaptatifs sur une surface de révolution a permis de créer un projet complexe à l’aide d’éléments simples et répétitifs. L’utilisation de cette fonctionnalité offerte par Revit dès les premières esquisses a permis une exploration rapide et précise des formes, favorisant ainsi la conception d’un dôme parabolique à la géométrie audacieuse, proche des utopies architecturales tout en étant très vigilant sur le volet économique afin de ne pas compromettre la faisabilité financière de l’opération.

Quels services ton agence propose-t-elle à ses clients au-delà de ceux du projet ? Création d’un DOE numérique et d’un jumeau numérique ?

 Nous proposons des projets sur mesure, en privilégiant des opérations avec des contraintes fortes où notre approche innovante peut présenter un avantage compétitif : rénovation dans un site contraint par exemple en secteur sauvegardé, recours à la préfabrication hors site, programme atypique…etc. Nous n’avons pas de programme de prédilection, tous pouvant constituer un défi intéressant. Nous travaillons en ce moment sur un projet d’enseignement démontable pour une grande école d’ingénieurs avec une approche modulaire bas carbone. La création d’un DOE numérique et d’un jumeau numérique découle naturellement de notre approche BIM.

Comment vois-tu ton agence d’ici quelques années ?

Effervescente d’idées et d’esprits passionnés je l’espère. Nous répondons à beaucoup d’appels d’offres en ce moment… Difficile de prédire où les opportunités nous conduiront mais nous privilégierons les projets ambitieux sur le volet environnemental et qui offrent du sens sur le volet social.

Y-a-t-il quelque chose de particulier que tu aimerais dire à nos lectrices et lecteurs ?

 Qu’ils n’hésitent pas – quel que soit leurs univers d’origine – à nous contacter s’ils trouvent un écho entre leurs ambitions et envies avec notre philosophie !

Comment peut-on d’ailleurs te contacter si l’on souhaite faire son projet ?

 Simplement en m’écrivant à l’adresse suivante : noemie.aureau@noau-atelier.com

Noémie, nous te remercions sincèrement et te souhaitons beaucoup de succès sur la route de l’architecture et du BIM !

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